vendredi 26 juin 2020

Jumeaux descendus d'une latitude laiteuse

"Je me rendais dans un village frontalier au creux d'une vallée, où j'avais prévu de passer un peu de temps pour explorer la région. Décontenancée par le tracé nébuleux de la route et les panneaux de signalisation détournés qui pointaient vers la nature, je finis par me perdre. Alors que je m'étais arrêtée sur la chaussées déserte pour prendre une bouteille d'eau dans le coffre, j'entendis craquer des brindilles et je décidai d'aller voir - chose à ne surtout pas faire...jamais. Dans les bois, je me sentis assailli de toutes parts. Des sortes de moucherons s'insinuaient dans mes narines et ma bouche et, en regagnant la voiture à grandes enjambées, je faillis marcher sur un nid de vipères frétillantes. Je repris le volant les mains moites.
Des panoramas dégagés se déployaient sous les lacets haut perchés, telle une gifle qui vous étourdit. Vertiges de velours, un monde replié sur lui-même, comme s'il vous incitait à plonger pour refaire surface de l'autre côté des abysses."

Kapka Kassabova, Lisière, Marchialy, 2020, p.37.

"Quelques jours plus tard, comme j'étais allée faire une course au village de "Traversée", qui surplombait une vallée fluviale vertigineuse et en offrait une vue imprenable, je vis Iglika en compagnie d'un des pâles nestinari. Ils passaient l'après-midi à l'ombre des vignes chez sa grand-mère à elle. Epargnés par le soleil, on aurait dit des jumeaux descendus d'une latitude laiteuse pour une brève escapade sur terre.
Le fouleur de braises m'adressa un sourire formel. je lui demandai comment il se sentait.
"Rechargé, répondit-il, distant. Le feu me recharge." "

Id. , p. 74 



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